L'article ci-dessous est paru dans le quotidien Libération, Paris, France, pages 1 et 4, le 4 octobre 1954.
Voir le dossier sur ce cas.
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Il ne nous a pas fallu attendre longtemps pour obtenir des preuves qui confirment de façon éclatante le jugement exprimé sur la floraison actuelle des "soucoupes volantes" par M. Evry Schatzman, maître de recherche à l'Institut astro-physique, dans l'interview que l'éminent savant a accordé à "Libération" (1): Les descriptions faites sont dans la majorité des cas incompréhensibles, dans tous les cas rendues infidèles, et la bonne foi des "témoins" est toujours à mettre en doute. Mais chaque fois qu'on a une observation précise et complète - ce qui est rare - il est possible de se faire une idée des phénomènes naturels dont il s'agit en réalité et qui peuvent faire illusion à l'imagination échauffée du public.
C'est ainsi que nous avons eu la curiosité de vérifier le dernier récit émanant de cantonniers des environs de Coulommiers et auquel nous avons fait une brève allusion samedi matin.
Jacques DEROGY
Suite page 4, Col. 2
(1) cf Libération des 2 et 3 oct.
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Suite de la P. 1-Col. 7
M. Bernard goujon, 30 ans, cantonnier des ponts et chaussées, demeurant chez sa mère à Faremoutiers, près de Morcef, a affirmé vendredi avoir vu, en compagnie de son camarade Armand Pichet, domicilié à Tresmes, une soucoupe volante posée à l'orée du bois de Maisoncelles.
Voici le récit qu'il fit à notre correspondant particulier, aux journalistes accourus, à la population rassemblée et aux gendarmes enfin alertés:
- C'était jeudi soir, à 17 h. 10. Il pleuvait. Pichet et moi nous étions en train de piocher sur la route de Maisoncelles à Meaux, à proximité du terrain d'aviation de Quincy-Voisins. Tout à coup, à 500 mètres devant nous dans les champs, j'aperçois une sorte d'énorme champignons brilliant comme de l'aluminium et je dis à Pichet: "Ça m'a tout l'air d'une soucoupe volante!" Le souffle coupé mon compagnon se cache aussitôt dans le fossé et me demande d'aller voir. Je cours à travers champs et je distingue de plus en plus nettement la soucoupe. Elle ressemble bien un gros champignon de trois mètres environ. Sur la partie supérieure se trouve une cabine avec trois hublots et l'engin repose sur trois béquillles disposées en triangle. Je m'approche, mais, arrivé à 150 mètres environ, me voilà stoppé net, comme paralysé. Je sens des picotements me parcourir des pieds à la tête, comme si j'étais électrisé. Cela dure trente à quarante secondes. Alors je vois la soucoupe s'élever lentement, tourner comme une feu lle morte jusqu'à 25 mètres et disparaître tout à coup comme aspirée par les nuages. Je n'ai entendu aucun bruit de moteur et n'ai vu aucune flamme, traînée ou fumée. Mais sur le sol, l'empreinte des trois béquilles reste nettement visible.
Bernard Goujon assurait que plusieurs cyclistes, passant à ce moment sur la route, aurait aperçu le mystérieux engin tout comme son camarade Armand Pichet. Ce dernier précisait, toutefois, s'être terré et n'avoir pas assisté à l'envol de la soucoupe-champignon.
La famille Pichet ne devait pas tarder à nous avouer qu'Armand n'avait, en fait, rien vu du tout: Goujon lui avait dit seulement avoir rendez-vous, à l'orée du bois, avec une soucoupe volante.
Or il nous fut facile de constater, à l'endroit indiqué, que des empreintes disposées effectivement ten riangle, avaient été creusées à la main. D'autre part, la description faite par Goujon correspondait, point par point, à un dessin reproduit la semaine dernière dans un quotidien parisien d'après le récit imaginé par des employés de l'E.D.F. d'Amiens, qui on s'en souvient, avaient monté un canular.
En même temps que nous faisions ces constatations, les gendarmes de Coulommiers conduisaient Bernard goujon devant le procureur de la République. Confondu, le cantonnier avait reconnu avoir inventé cette histoire de toutes pièces en la croyant tout à fait plausible. Il se verrait inculpé aujourd'hui d'outrage à magistrat. En tout cas, il n'a plus oser reparaître sur la place publique de Faremootiers, où ses parents maintiennent maintenant bien clos l'huis qu'ils n'avaient de cesse d'ouvrir l'autre nuit aux journalistes et aux gendarmes.
On voit ainsi comment peuvent se multiplier des témoignages, quand le climat est créé, et quel rôle joue certaine presse en entretenant soigneusement celui-ci est en sollicitant ceux-là. L'opération soucoupe est une diversion idéale aux causes d'inquiétude populaire.
Un autre fait vient de confirmer, d'autre part, la justesse de l'appréciation de M. Schatzman: Après avoir minutieusement étudié la photographie prise mardi dernier en Suède par le photographe Toed Olsson, les experts militaires suédois sont parvenus à la conclusion il s'agissait simplement des traces de condensation laissées par un avion ordinaire volant à haute altitude et à grande vitesse. Il ne s'agissait même pas d'un appareil ou d'une fusée téléguidée.
Dans une question écrite, M. Jean Nocher, député de la Loire (non inscrit), fait part au secrétaire d'Etat à l'Air de l'émotion suscitée dans le public par les nombreux et divers témoignages concernant les soucoupes volantes.
"Il lui demande si ses prédécesseurs au secrétariat d'Etat à l'Air s'étaient préoccupés, comme aux Etats-Unis et en U.R.S.S. depuis de longues années, d'ouvrir une enquête sur la présence dans notre atmosphère d'objets volants non identifiés."
"Si oui, il lui demande les résultats publiables de ces investigations, sinon, et lui demande de constituer une commission largement étendue à toutes les branches scientifiques intéressées, afin d'étudier objectivement ce phénomène en dégageant la vérité des erreurs ou des mystifications possibles."
Perth (Ecosse), 3 octobre. -- En dehors des cigares, tous les mystérieux objets volants dans les ciels du monde avaient, jusqu'à maintenant, adopté des formes de vaisselle: soupières, cafetières, tasses et soucoupes, mais l'Ecosse signale, aujourd'hui, une nouveautée pour le moins inattendue: l'escargot volant.
Deux dames de Perth qui, avant de raconter leur aventure affirment ne pas être des ivrognes, auraient, hier soir, vu deux objets voyageant dans le ciel. Ils avaient, déclarent-elles, une forme ronde suivie d'une queue et se déplaçaient de la même manière que les escargots... mais des escargots extrêmement pressés.