L'article ci-dessous est paru dans le quotidien Le Progrès, France, le 28 juillet 1947.
Tandis que nous dansons devant le buffet, les Américains sont figés devant les soucoupes volantes.
Ces mystérieux météores nous sont décrits comme des disques éblouissants qui sillonnent le ciel à une vitesse de 2.000 km. à l'heure.
On crut d'abord à une hallucination. Mais les témoignages sont si nombreux que le scepticismes commence à tomber et que les savants eux-mêmes s'émeuvent.
Au siècle des V 2, du radar et de la bombe atomique, on ne saurait s'étonner de grand-chose, et depuis l'étoile des rois-mages, il y a eu assez de comètes sous la calotte des cieux pour que le XXe siècle ait le droit d'avoir sa part.
Ce qui frappe, en l'espèce, c'est simplement la dénomination que les Américains réservent à ces astres nouveaux.
Car, autrefois, quand quelque lueur inédite apparaissait dans l'ombre, elle haussait tous les esprits aux splendeurs de la poésie. Aujourd'hui, il semble que ce soit le contraire.
Faut-il croire que les lumières éteintes, dont parlait Viviani, se vengent dans le ciel sous forme de soucoupes? Mais pourquoi donc soucoupes et non pas disques, ou boules de feu, ou soleils blancs?
Il nous restait le ciel pour prier ou pour rêver. Une division du travail toute spontanée réservait à la terre les soucis du garde manger et ouvrait à l'amour les espaces sidéraux. C'est fini. Les nuits de la Saint-Laurent ne nous apportera plus son feu d'artifice d'étoiles filantes, mais une pluie de soucoupes.
Coucher à la belle étoile devient une expression vide de sens. Nous n'aurons plus qu'à nous étendre, le ventre creux, sous la voûte nocturne, en regardant la valse des soucoupes.