L'article ci-dessous est paru dans le quotidien Le Patriote de Nice et du Sud-Est, Nice, France, pages 1 et 7, le 19 octobre 1954.
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Dans une enquête policière, on se demande toujours: "A qui profite le crime?". Dans la vaste enquête que des millions de gens ont entrepris au sujet des "soucoupes volantes", il serait bon, parfois de se poser la même question. Car si de nombreux témoins sont de bonne foi, s'il est possible de voir dans le ciel des choses bizarres, si comme on l'a appris ces jours-ci, des appareils ressemblant aux descriptions données sont en étude, construction et même essai, il reste que bien souvent la soucoupe n'est qu'un couvercle et le pot aux roses est vite découvert...
C'est ainsi qu'il y a dix jours, M. André Narcy, 47 ans, cantonnierà Mertrud, arrivait à son travail tout essoufflé: "J'ai vu une soucoupe volante", affirma-t-il, et de donner force détails: un engin de couleur orange arrêté dans un champ, un petite être vêtu d'une houppelande à poils. Un beau démarrage à la verticale du mystérieux appareil.
D'ailleurs, M. Narcy pouvait montrer l'endroit. Avec deux de ses camarades, MM. Riel et Henry, il y retourna. Tous trois déclarèrent qu'en effet, la rosée avait séché sur une certaine surface, que l'herbe avait pris "une teinte légèrement laiteuse", qu'on apercevait des traces de "pieds ronds", etc...
Bref, interrogé à nouveau par la gendarmerie, M. Narcy vient d'avouer qu'il avait monté cette histoire de toutes pièces pour excuser son arrivée tardive au travail...
D'autre part, il y a des témoins dont l'imagination est trop vive et qui feraient carrière dans le roman d'aventures, voire d'anticipation.
Exemple: un jeune homme, la semaine dernière, circulait sur un vélomoteur, dans les environs de Grasse. Il faisait beau, la nature était encore riante. Tout allait très bien. Soudain le héros de l'histoire vit s'écarter les branches d'un bosquet au bord de la route et un être étrange apparaissait: un casque noirâtre en guise de tête, et une peau qui ressemblait à du cuir, de gros yeux vitreux et protubérants...
"Un Martien!" réalise le cycliste qui, sous le coup de l'émotion, manque de tombé par terre. Après avoir fait plusieurs zig-zags et caler son moteur, il repart, pleins gaz, pour alerter qui de droit.
Deux cent mètres plus bas, le jeune homme voyait la réplique vivante de son "Martien": un motard de la police de la route qui attendait, auprès de deux motos, son collègue parti "rendre à la nature le trop plein de ses bienfaits"...
Rendez-vous compte, si le témoin n'avait pas vu les deux motos et le policier, les Alpes-Maritimes compteraient un "Martien" de plus!... Comme quoi souvent la légende tient à peu de choses...
Mais il y a plus dangereux comme hallucination.
M. Maurice Ruant, cultivateur à Sinceny, près de Chauny (Aisne), a bien failli en être victime.
Vendredi soir, il était occupé à dépanner sa voiture dans un pré proche de chez lui, quand deux coups de fusil furent tirés dans sa direction. Les plombs se écrasèrent sur la carrosserie du
Paul HUMBOURG.
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véhicule, non loin de sa tête. M. Maurice Ruant porta plainte et l'enquête aussitôt ouverte permit de retrouver rapidement l'auteur des deux coups de feu, qui était le voisin de M. Ruant, M. Faisan.
Ce dernier a déclaré à la police:
"J'ai cru, envoyant une silhouette évoluant dans la lumière de deux phares, être en présence d'un Martien en train de réparer sa soucoupe volante. Je suis allé chercher mon fusil et j'ai tiré".
Inutile de préciser que M. Faisan sera poursuivi, malgré sa bonne foi! En voilà un, en tout cas, qui ne serait pas très hospitalier pour les habitants des autres planètes. Les Martiens, s'ils apprennent, risquent d'aller plutôt dans la lune, il faut dire qu'ils y rencontreraient beaucoup de terriens qui y sont déjà...
Bref, soyons prudents. Le motocycliste bien équipée fera bien de suspendre à son cou une pancarte proclamant qu'il est bien de ce monde, et les réparations de nuit ne sont plus à envisager, à proximité des lieux habités. Car à vrai dire ce ne sont pas les Martiens qui sont dangereux, mais les voisins. Nous le pensions déjà avant l'apparition des "soucoupes volantes". Nous en sommes, aujourd'hui, persuadés!