L'article ci-dessous est paru dans le quotidien The Times, Angleterre, le 5 février 2003.
Reportage
Par Adam Sage
Si la vérité est vraiment là dehors, les Français prennent des mesures sérieuses pour la trouver
En un matin froid un Lundi il y a 22 ans, Jean-Jacques Vélasco était assis à son bureau quand un gendarme a téléphoné pour lui parler au sujet d'un incident étrange. Renato Nicolai, un technicien retraité, était en train de travailler dans son jardin à Trans-en-Provence, près de Nice, quand il a vu un objet foncé, rond, descendre du ciel, se poser sur la terre et décoller à nouveau, lui dit le gendarme.
Au cours des années, Vélasco a entendu beaucoup de telles histoires, et a réfuté la plupart d'entre elles. Mais celle-ci était différente - celle-ci était crédible, pense-t-il. Quelque chose semble avoir atterri à Trans-en-Provence, dit-il, et ce quelque chose n'a été jamais identifiée.
Mais qui est Vélasco? Un autre cinglé déterminé à trouver une soucoupe volante? Un adepte de Claude Vorilhon, le Français qui a fondé la secte des Raeliens sur ses affirmations qu'il était le fils d'un être extraterrestre? Non, il est un scientifique travaillant pour le Centre National pour les Etudes Spatiales (CNES) géré par l'Etat français, où il dirige un département responsable d'analyser ce que l'on appelle généralement les objets volants non identifiés (OVNIS) mais qui sont officiellement connus en tant que phénomènes aérospatiaux non identifiés (UAP).
C'est un département unique, le seul projet scientifique permanent financé par un gouvernement d'un pays développé pour démêler le fait de la fiction dans le débat sur les OVNIS.
Dans un secteur qui attire les dérangés et les rêveurs, ceci est un programme de recherche sérieux. "Nous avons prouvé qu'il y a une catégorie d'événements qui ne sont pas une partie de l'arrangement physique classique des choses," dit Vélasco. Ceux-ci peuvent être une lumière, ou un objet se déplaçant à travers le ciel sur une "trajectoire anormale," parfois silencieusement.
"Dans certains cas, il y a un sentiment que le phénomène adapte son comportement à l'environnement. Dans d'autres, les gens prétendent avoir vu de petits objets matériels très près d'eux, qui peuvent même atterrir. Dans les cas les plus extrêmes, les gens prétendent voir des objets avec des êtres à côté d'eux."
Soigneusement vêtu, l'homme à lunettes, Vélasco, parle avec la précision soigneuse d'un académique qui tient à être compris. Il ne dit pas qu'il a trouvé des visiteurs d'une autre planète; il dit simplement que les événements se produisent pour lesquels la science a encore à trouver une explication, et qui méritent plus de recherche.
"Il y a deux cents ans, l'Académie Française de la Science a dit que les météorites ne tombent pas sur la terre, que ce phénomène n'existe pas," dit-il. "Maintenant nous savons qu'il existe."
Le département de Vélasco a été mis en place en 1977, l'année ou Rencontre Rapprochées du Troisième Type a été projeté au milieu d'une une fièvre globale des OVNIS. A travers le monde des gens pensaient avoir vu des figures étranges, des soucoupes volantes et des lumières brillantes. Des sectes telles que les Raeliens ont prétendu avoir été en contact avec la vie extraterrestre. Et des associations d'amateur se sont promises de faire la lumière sur la question brûlante: sommes-nous seuls? Mais il y avait peu de tentatives sérieuses de régler le problème. Les autorités des USA l'avaient étudié dix ans plus tôt et avaient conclu que c'était un gaspillage de l'argent des contribuables. La plupart des autres pays, y compris la Grande-Bretagne, ont pensé de même. Seulement la France a pris le sujet au sérieux, en partie parce qu'elle a l'appareillage centralisé d'état nécessaire pour ce faire, et en partie, sans aucun doute, en raison d'une croyance immodeste que si un OVNI doit être trouvé, la France devrait être le pays qui le trouve.
Le CNES a dûment installé le Service d'Expertise des Phénomènes de Ré-entrée atmosphérique (SEPRA). Basé à Toulouse, le département est aussi pesant que son titre l'indique: le personnel sont des scientifiques payés par l'état, formés par une culture prudente, rigoureuse et quelque peu bureaucratique. En France une telle bureaucratie peut souvent être encombrante et péniblement rigide. Pourtant dans ce domaine au moins, cette rigidité offre une garantie d'une impartialité qui est rare en ce qui concerne les OVNIS.
L'année dernière, quand on a dit au CNES de réduire son budget de 1.3 milliard d'€ (853 million de £), le président de l'organisation, Alain Bensoussan, a commandé un audit du le travail du SEPRA. On a demandé à un éventail de scientifiques français s'il valait la peine de continuer la recherche; presque tous ont dit oui.
Une raison est que, à la différence de la plupart des autres chasseurs d'OVNIS, le personnel du SEPRA ne recherche ni publicité ni ne propage une croyance obscure en la civilisation extraterrestre. Ils disent qu'ils ne savent pas si des êtres extraterrestres existent ou pas, et semblent faire la moue quand vous leur demandez d'exprimer leurs opinions sur la question.
Ils n'ont pas d'opinions, seulement des statistiques. Pourtant les statistiques que Vélasco a rendues publiques sont éloquentes. Depuis 1977, le SEPRA a reçu environ 6.000 rapports d'observations alléguées d'OVNIS. De ces derniers, 110 proviennent d'équipages d'avions civils ou militaires, et le reste de français moyens qui ont presque invariablement contacté leur gendarmerie locale. Dans 21,3 pour cent des cas il y a une explication claire, indiscutable et banale: une explosion d'un feu d'artifice, un nouveau système d'éclairage impliquant un ballon lumineux, un nuage au-dessus des Pyrénées qui a la même forme qu'une soucoupe volante. Dans 24,9 pour cent des cas il y a une explication probable, et dans 41,3 pour cent des cas l'information est trop vague pour être utile. Mais dans 12,5 pour cent des cas - environ 750 observations depuis - 1977 les preuves sont précises, détaillées et inexplicables, et elles sont ainsi classée dans la catégorie des phénomènes non identifiés.
Avant de tirer une telle conclusion, Vélasco mène une recherche étendue en utilisant une méthode qualifiée d'exemplaire par Peter Sturrock, un scientifique académique britannique qui a fondé la société pour l'exploration scientifique. Cela implique de s'informer sur le milieu social psychologique et la personne prétendant avoir vu un OVNI, de vérifiant le rapport initial du témoin contre toute autre preuve disponible et de travailler avec différentes branches de l'administration française. Par exemple, le SEPRA a une procédure formelle que doit suivre chaque gendarmerie qui traite d'une observation alléguée. Les policiers isolent le secteur, prennent des échantillons de sol et posent des questions préétablies pour éliminer les fous et les ivrognes.
Mais la plupart des OVNIS allégués sont repérés par des gens sobres et sensés, dit Vélasco. "Dans toutes nos statistiques sur les personnalités des gens qui voient ces phénomènes seulement une pour 1.000 n'est pas crédible en raison de l'alcool. Les gens vont à la gendarmerie spontanément; dans 99 pour cent des cas c'est parce qu'ils veulent véritablement savoir ce qu'ils ont vu."
Pourtant la bonne foi d'un témoin n'est pas suffisante, et l'histoire doit être corroborée. "Ce qui intéresse le scientifique n'est pas tant le récit qui est fait, mais d'aller plus loin et de vérifier le récit en le confrontant à des données objectives, pour mesurer ces phénomènes," dit Vélasco. Ainsi il a établi des liens avec les laboratoires qui analysent des échantillons trouvés sue les lieux, et un accord avec les autorités des aviations civiles et militaires pour fournir les détails radar de tous les objets volants non identifiés.
Considérer, par exemple, un cas rapporté en 1994, quand l'équipage d'un vol d'Air France de Nice vers Londres a vu un objet sombre, de 300 mètres de long au-dessus de la région de Paris. L'objet a disparu avant que l'avion ne se soit approché de lui, et le vol a continué sans difficulté. Quelques jours plus tard Vélasco a voyagé de son bureau à Toulouse au centre militaire de contrôle de l'aviation à l'extérieur de Paris, où il lui a été donné lecture des informations radar du jour en question. Cela a révélé qu'un objet inconnu avait effectivement volé au-dessus de la capital française.
Considérer, aussi, le cas de Trans-en-Provence. Vélasco est passé par les vérification habituelles avec le gendarme qui lui a téléphoné. Le témoin, Nicolai, sentait-il d'alcool ou bafouillait-il de façon incohérente? La réponse était non. Y avait-il une preuve pour soutenir son histoire? La réponse apparente était oui, puisqu'il y avait des marques dans l'herbe là où l'objet avait censément atterri.
Vélasco a roulé vers Trans-en-Provence et a pris les échantillons de sol. Ceux-ci ont prouvé que le secteur avait été chauffé à entre 300°C et 600°C, qu'il avait été comprimé par quelque chose pesant jusqu'à une tonne et que les plantes là avaient été affectées par un champ électromagnétique puissant. Vélasco a conclu que Nicolai avait en effet été témoin d'un événement étrange.
Donc, devrions-nous conclure que les petits hommes verts jetaient un coup d'oeil sur la Provence depuis leur vaisseau spatial? Vélasco écarte de telles idées. "Nous ne pouvons pas dire s'il y a un lien entre la question de la vie extraterrestre et celle des phénomènes aérospatiaux non identifiés," dit-il, ajoutant: "Mais nous pouvons prouver que les OVNIS existent. Le problème est leur interprétation, et j'espère que des scientifiques, et d'autres, examineront cette question plus sérieusement."
Un OVNI (objet volant non identifié): a UFO (unidentified flying object).
Une soucoupe volante: a flying saucer.
Les extraterrestres sont parmi nous: the aliens are among us.
Rencontres Rapprochées du Troisième Type: Close Encounters of the Third Kind.
C'était un petit bonhomme vert: it was a little green man.
C'est quoi, cette étrange lumière dans le ciel?: what's that strange light in the sky?
Les extraterrestres essaient de communiquer avec nous: the aliens are trying to communicate with us.
Amenez-moi à votre chef: take me to your leader.