L'article suivant est paru dans le journal Le Varois - La Marseillaise, France, le dimanche 21 décembre 1980.
En quelques mois, des millions de spectateurs dans le monde ont vu "Rencontres du 3éme type". Ce film a fouetté les imaginations et relancé le débat sur les OVNI.
Depuis mai 77, en France, un organisme, le GEPAN (1), créé par le Centre National d’Etudes Spatiales (CNES), a pour mission d’étudier les données receuillies entre autres, par la gendarmerie nationale.
Claude Poher, responsable de ce groupe, est donc bien placé pour répondre aux questions que nous nous posons tous.
(1)– GEPAN: Groupement d’Etudes des Phénomènes Aérospatiaux Non-Identifiés.
Monsieur Poher croyez-vous aux soucoupes volantes?
La question n’est pas de croire ou de ne pas croire aux soucoupes volantes. Il y a des "choses" que des gens voient. Ces personnes sont dignes de foi et leurs témoignages, souvent très détaillé, nous permet une étude scientifique du phénomène. J’ai enquêté des dizaines de cas personnellement et découvert des caractéristiques différentes de ce que l’on connaît. Certains témoignages ne peuvent être expliqués par des phénomènes connus, observables dans le ciel.
Que voient les personnes qui témoignent sur les OVNI?
Oh, une foule de choses. Cela peut aller du ballon sonde à la foudre en boule jusqu’au ver luisant. Les météorites, par exemple, durent peu de temps, vont en ligne droite et sont visibles sur un grand territoire. On reçoit parfois 50 ou 60 rapports pour une météorite un peu importante ou une rentrée de satellite dans l’atmosphère. Par contre, quand on nous décrit une lumière grosse comme la pleine lune, qui s’est arrêtée en plein ciel pour repartir en sens inverse à une vitesse colossale, ça c’est quelque chose d’inconnu. Le GEPAN étudie donc ces lumières nocturnes inexplicables.
Mais les soucoupes volantes que l’on voit en photo existent-elles?
Il est souvent difficile de se procurer les négatifs, ce qui prouve le canular. J’ai analysé quelques clichés spectaculaires. C’est une maquette lancée, un enjoliveur de voiture, un "truc" tenu au bout d’une canne à pêche. Quelques uns ont même essayé de gagner de l’argent avec les photos que des journaux à sensation leur achetaient. Les seules photos qui ont l’air véridiques, c'est-à-dire non trafiquées, n’ont rien de spectaculaire, juste un point lumineux sur un fond de ciel noir !
Comment faites-vous pour démêler le vrai du faux?
Il n’y a pas d’un côté ce qui est vrai et de l’autre ce qui est faux. Il y a des phénomènes aérospatiaux explicables et d’autres qui ne le sont pas, ou pas encore. A part certains farceurs, les témoins sont dignes de foi. Nous disposons de 15 000 témoignages dont 80% sont des phénomènes connus et expliqués: ballons-sondes, satellites, planètes, etc. Dans les 20% restant, nous travaillons que sur les cas où les témoignages sont suffisamment détaillés et nombreux: les témoins sont compétents ou bons observateurs, ils décrivent bien le phénomène observé. Si nous considérons que des lumières nocturnes comme non identifiées, c’est parce qu’elles ont un éclat, une grosseur ou une trajectoire inconnue.
Disposez-vous d’équipes qui vont étudier sur les lieux mêmes du phénomènes?
Nous avons des groupes d’intervention rapides qui sont prêts à partir de jour comme de nuit. La gendarmerie nous alerte immédiatement après le témoignage et nous allons enquêter sur place. Un questionnaire nous permet de déterminer la sincérité du témoin. Puis nous pratiquons une reconstitution, comme les gendarmes reconstituent un crime. Par exemple, nous disposons d’un échantillon de 500 couleurs. Nous demandons séparément aux témoins de quelle couleur était l’OVNI. Oh surprise, dans 95% des cas, les gens nous donnent exactement la même couleur. Puis les enquêteurs dont la synthèse de leurs renseignements. Dans presque tous les cas, les témoins ont vraiment vu quelque chose. Ensuite on essaie de savoir ce que c’était.
Avez-vous résolu certains cas difficiles?
En quelques mois, nous avons identifié 13 ou 14 cas qui semblaient incompréhensibles au départ. Mais il nous arrive aussi de conclure à l’inexplicable. L’objet perçu n’est pas identifiable.
Peut-on expliquer ces phénomènes par la présence d’extra-terrestres?
Comprenons-nous bien! Effectivement les scientifiques pensent qu’il est possible ou plutôt probable que la vie apparaisse ou soit apparue sur d’autres planètes dans l’Univers. Par contre la science actuelle est incapable de réaliser ni même de concevoir un engin capable d’atteindre la première étoile venue. Dans l’état actuel de nos connaissances les voyages interstellaires sont impossibles. Quant aux stations relais "proposées" par certains, les milliers d’observations faites par les astronomes auraient permis de les découvrir. L’hypothèse des extra-terrestres est donc à considérer avec énormément de prudence.
Alors quelle est votre explication?
Nous n’avons pas d’explication toute faite. Nous sommes des scientifiques et nous étudions en détail tous les témoignages. Nous découvrons parfois que le cas en question est un phénomène connu, sinon...
Nous cherchons les moyens de perfectionner notre travail: avant la fin de l’année, nous allons construire un simulateur pour interroger les témoins. Cet appareil, qui reconstitue complètement l’observation, est une boite mobile connectée à un enregistreur automatique. Elle permet au témoin, grâce à sa seule mémoire visuelle, de reconstituer "son OVNI". C’est beaucoup plus précis que des mots. Ce sera un très grand progrès dans l’étude des OVNI.
Plusieurs phénomènes naturels sont parfois à l’origine de témoignages sur les Ovni. En voici une liste dressée par le GEPAN: