L'article ci-dessous est paru le dans le quotidien La Dépêche du Midi, le 1er décembre 2002. Les liens dans l'article sont ajoutés par l'auteur de ce site.
Philippe Brassart
PRIS à tort, par des témoins trop crédules, pour des engins venues d'autres planètes, la plupart des "objets volants" sont identifiés. Il s'agit de ballons-sondes, de phénomènes atmosphériques connus, de banales étoiles, ou le plus souvent, de fragments de fusées, de navettes, de satellites, des "débris spatiaux" rentrant dans l'atmosphère terrestre. Le nombre de ces "débris" est évalué à 35 millions, ils mesurent de quelques microns à plusieurs mètres et peuvent se révéler dangereux. A Toulouse, la semaine dernière, le sujet a été évoqué lors d'un colloque international.
Restent les autres. Non identifiés dans l'état actuel de nos connaissances. Passionné par le sujet, le mécène américain Laurance Rockefeller a confié, fin 1997, au Britannique Peter Sturrock l'organisation, à Pocantico (Etat de New York), du premier colloque scientifique digne de ce nom consacré aux ovnis. Cet astrophysicien de renom a réuni un panel de neuf scientifiques de haut niveau qui ont, à leur tour, auditionné les rapports de sept enquêteurs expérimentés, dont le Toulousain Jean-Jacques Vélasco. Peter Sturrock ne s'exprime donc pas à la légère et ses conclusions, enfin publiées en France (1) sont aussi sérieuses que le personnage. Y a-t-il un connexion entre les ovnis et une éventuelle "intelligence extraterrestre"? Prudents, rigoureux, les scientifiques consultés ne répondent pas en ces termes à cette question, se bornant à énoncer des faits bruts.
L'"histoire" officielle des ovnis est connue. Elle commence dans l'Orégon, en 1947, avec le témoignage d'un pilote civil, Kenneth Arnold, qui raconte avoir vu, à travers le pare brise de son avion, "neuf choses bizarres" volant à une vitesse extraordinaire "comme des soucoupes ricochant sur l'eau." La presse se rue sur l'affaire, forge le mot "soucoupe volantes" (en anglais Saucer-like objects). Puis les gouvernement, à l'Ouest comme à l'Est, dénient longtemps toute réalité matérielle au phénomène. La Pravda ira jusqu'à parler d'"hallucinations de chômeurs affamés et désespérés." On notera qu'en France, en 1967, "l'Express" déplorait encore ce qu'il nommait "des phénomènes d'hystérie collective" ...
L'opinion des scientifiques trop soucieux de leur carrière a, depuis, évoluée, quelques-uns d'entre eux ont rengainé leur scepticisme. Le symposium de Pocantico en est la preuve. Des faits? il y en a, à foison. Parmi les plus récents, cette observation faite, en Janvier 1994, au Sud-Est de Paris, à 11.000 m d'altitude, par l'équipage d'un avion, -- et au sol, par les radars --, d'un "disque" de ... 1.000 m de diamètre et de 100 m d'épaisseur. Celle, également, de Trans-en-Provence: le 8 Janvier 1981, Renato Nicolai sort de sa maison, alerté par un "sifflement étouffé" et voit atterrir un "objet ovoïde" ayant "la forme de deux soucoupes l'une à l'envers posée sur l'autre"; des traces ont été relevées, les plantes ont subi une forme de traumatisme, un "vieillissement accéléré". Le mystère n'a pas encore été élucidé.
Des observations de cet ordre, il en existe des milliers, dans tous les pays du monde. Elles s'accompagnent parfois, comme dans "Rencontres du troisième type," de pannes subites des voitures des témoins, de phénomène perturbant les instruments de navigation des avions. Il y a des "constantes:" les "objets" décrits sont, généralement, parfaitement silencieux, changent brusquement de vitesse et/ou de direction. Il arrive que l'arrivée de ces ovnis ait des effets physiologiques sur ceux qui les voient: forte chaleur ou sensation de froid, picotements, surdité temporaire, nausées tenaces. Cas remarquable, celui de Betty Cash et Vickie Landrum observant, accompagnées d'un enfant, en Décembre 1980 au Texas, un objet "en forme de diamant," planant au dessus
de leur voiture, crachant des flammes vers le bas. Ces témoins ont passé plusieurs semaines à l'hôpital, victimes de brûlures. Des hélicoptères ont accompagné le décollage de l'"engin," d'où l'hypothèse, avancée mais jamais confirmée, d'opérations militaires secrètes.
Il y a des faits, et même des photos, troublantes, de "disques aériens," documents analysés pour éliminer toute mystification. Ainsi, le 24 Août 1990, à Greifswald (Allemagne), des dizaines de personnes ont photographié, d'autres ont filmé, des formations de "sphères lumineuses" évoluant dans le ciel, accélérant et changeant brutalement de direction. Surprenante tout autant cette rencontre rapprochée -- confirmée par des témoins au sol --, en Octobre 1973, au-dessus de l'Ohio, entre un hélicoptère transportant des militaires et un "objet métallique" gris, "en forme de cigare," avec un lumière rouge à l'avant." Un avion? Un météore? Ni l'un ni l'autre n'auraient pu avoir ce comportement, ralentir, se stabiliser, repartir à vitesse modérée puis s'évanouir.
Sur la base de multiples témoignages de cet ordre, dûment disséqués, les scientifiques réunis à Pocantico ne concluent pas péremptoirement que les ovnis sont des véhicules extraterrestres. Raisonnablement, et nous laissant quelque peu sur notre faim, ils soulignent qu'il existe des phénomènes que la science n'est pas encore en mesure d'expliquer, que les ovnis constituent "un sujet digne d'études scientifiques" qu'il conviendrait de pousser plus avant -- il ne prête donc plus à sourire --, mais qu' "il est improbable qu'il y ait une seule réponse générale et simple." Au passage, ils remarquent -- et c'est un bel éloge --, que le Sepra (Service d'expertise des phénomènes rares aérospatiaux) créé en 1977 au sein du Cnes (Centre national d'études spatiales basé à Toulouse) "fournit un bon modèle d'organisation pour recueillir et analyser des observations d'ovnis." Convié à Pocantico, Jean-Jacques Vélasco, directeur du Sepra -- qui a collecté en 25 ans plus de 3000 témoignages de "phénomènes" dont la quasi totalité ont trouvé une explication rationnelle --, doit d'ailleurs rencontrer prochainement son homologue du Pérou qui, comme le Chili et l'Uruguay, s'est doté d'un service du type Sepra, à une différence près: en France, il s'agit d'un organisme public, dans ces pays, les militaires s'en mêlent... Jean-Jacques Vélasco est le premier à regretter que les conclusions du symposium n'aient pas stimulé davantage la recherche outre-Atlantique. S'agirait-il d'un secret d'Etat? Ou d'une volonté de nier le phénomène, de le tourner en dérision? Mais alors pourquoi, s'ils n'y croient pas, les astronomes du Seti (Recherche d'une intelligence extraterrestre) persistent-ils, avec leurs "grandes oreilles," à tenter de capter des signaux artificiels émis par de lointaines planètes?
La question que nous nous posons demeure donc en suspens: si extraterrestres il y a -- car d'autres hypothèses, folles en apparence, ont été émises, êtres du futur ou d'un univers parallèle... --, que veulent-ils? Claude Poher, ingénieur du Cnes, affirmait, énigmatique: "La vérité se situe sans doute au-delà de tout ce qu'on peut imaginer." Le sociologue Pierre Lagrange, spécialisé dans l'étude des controverses sur les ovnis, à prolongé le raisonnement en suggérant à propos d'êtres "qui peuvent avoir une apparence physique et des modes de communication dont nous n'avons aucune idée": "Les différences culturelles entre nous et "eux" risquent d'être si grandes que nous serions même incapable de nous rendre compte de leur présence." Seraient-ils déjà parmi nous?
(1) A Lire: "la science face à l'énigme des ovnis," Peter Sturrock, éditions Presse du Châtelet.